Le Petit Prince est incroyable !
Une commande…
1942. Saint-Exupéry dîne avec son éditeur américain Eugene Reynal. Comme à son
habitude, il dessine sur la nappe des personnages inventés, dont un petit
bonhomme. Séduit par cette silhouette d’enfant ailé, Reynald lui aurait proposé
d’écrire un conte pour enfants, qu’il publierait à Noël. On raconte aussi que
cette proposition serait venue de la part d’Elisabeth, l’épouse d’Eugene
Reynal. Elle espérait offrir ainsi un remède au désœuvrement d’un auteur qui souffrait
de son exil dans un pays qu’il n’aimait pas, blessé par l’accueil controversé
de son dernier livre, Pilote de guerre, attaqué de toutes parts par ceux qui
espéraient l’enrégimenter et lui en voulaient de ne pas partager leurs idées.
A moins que…
Selon d’autres sources, depuis sept ans au moins, Saint-Exupéry envisageait
d’écrire un conte de fées. Dont le personnage principal aurait été un enfant…,
son frère François, peut-être, qu’il aimait tant, perdu si jeune et qu’il
nommait, à l’époque, dans leurs jeux, « le roi soleil »… D’ici à en faire un
Petit Prince…
Travail de nuit
Sur les conseils de son ami Paul-Émile Victor, Saint-Exupéry s’achète des
crayons aquarelles et quitte la jungle urbaine pour s’installer dans un manoir de Long Island. L’écrivain manie la plume à la nuit tombée, à grand
renfort de café et de cigarettes. Il trace l’odyssée de son Petit Prince. En
pleine nuit, il téléphone à ses amis pour leur en parler, solliciter leur avis.
Parfois il leur demande de prendre des poses pour ses dessins. Le fils du
philosophe De Konnick lui aurait servi de modèle pour certaines attitudes, le
boxer de Sylvia Reinhardt pour un tigre, et le caniche d’un ami pour dessiner
le fameux mouton. Parfois, épuisé, Saint-Exupéry s’endort sur son bureau.
Le livre enfin !
Saint-Exupéry travaille à son Petit Prince tout l’été et une partie de
l’automne. A la fin de l’année 1942, il confie le manuscrit à son éditeur.
Eugene Reynal fait traduire le texte et publie simultanément la version
originale et la traduction anglaise le 6 avril 1943, au moment où Saint-Exupéry
quitte les Etats-Unis pour rejoindre en Algérie les Forces françaises libres.
La première édition française du Petit Prince sera publiée par les Editions
Gallimard après la Libération et la mort de l’auteur, en 1946.
La célébration des 70 ans
du Petit Prince permet de rappeler au plus grand nombre le message universel
que nous a délivré Antoine de Saint-Exupéry. Ne jamais oublier l’enfant que fut
chacun d’entre nous. Se souvenir du bonheur que suscite pour l’enfant la
découverte du monde, les rencontres. Conserver dans notre vie de tous les jours
la force du questionnement, le refus de l’injustice, l’acceptation de l’autre
pour ce qu’il est et non pour ce qu’il représente, la recherche permanente du
lien avec les hommes, avec la nature. Ne pas oublier de prendre le temps de
regarder une fleur, de la contempler, de s’émerveiller de sa beauté.
Avec le Petit Prince,
Antoine de Saint-Exupéry nous place face à nos responsabilités. Il nous incite
à refuser le totalitarisme quelle que soit sa forme, il nous invite à prendre
le temps du recul et de la réflexion avant d’agir, il nous délivre un message
humaniste.
Célébrer les 70 ans du Petit Prince c’est avant tout mettre en avant
l’intemporalité de l’oeuvre d’Antoine de Saint-Exupéry. Ne jamais oublier que
l’essentiel est invisible pour les yeux.
Le Petit Prince traverse l’espace et le temps pour rester totalement moderne.
Au-delà du conte, le personnage créé par Saint-Exupéry est devenu une icône
globale, part de notre ADN, et porteuse de valeurs positives et actuelles : la
paix, la protection de la planète, la protection de l’enfance, la tolérance,
l’échange culturel, le droit à l’éducation…La force d’évocation de cette
silhouette de petit bonhomme est unique !
Le destin fabuleux de
cet « olni » (objet littéraire non identifié) en a fait un véritable phénomène
éditorial. Livre non religieux le plus traduit dans le monde, on compte
aujourd’hui près de 265 traductions, plus de 1300 éditions et 145 millions de
copies vendues.
Aujourd’hui, Le Petit Prince est le héros d’une série animée pour la télévision
présente dans plus de cent pays et regardée par des millions d’enfants, il a
été nommé ambassadeur virtuel de l’ONU et du plus gros hôpital pour enfants
d’Amérique du Sud, il réunit 5 millions de fans sur Facebook, il recevra
bientôt un hommage merveilleux au cinéma dans un grand film international
franco-américain. Idéal pour l’apprentissage des langues, Le Petit Prince est
étudié dans les écoles de différents pays étrangers dont le Maroc et le Japon.
Pour lutter contre l’illettrisme, une version en langue tifinar a été offerte à
la population touarègue, et une autre, en khmer, a été récemment publiée au
Cambodge. En 2005, Le Petit Prince a été traduit en toba, langue amérindienne
du nord de l’Argentine, qui n’avait jusqu’à ce jour accueilli qu’une seule
traduction : La Bible.